vendredi 4 mai 2012

Un outil de régulation

Le revenu de base, outil de régulation du marché du travail

Une lame de fond s’abat actuellement dans les cafés repaire de l’île de la Réunion, ces lieux d’échanges initiés par l’émission «là bas si j’y suis». Du nord au sud, la présentation du revenu de base éveille les curiosités.

A ceux qui prétendent que la Réunion vit sous perfusion et que le revenu de base le mettrait encore plus en évidence, les autres répondent qu’une île est un endroit approprié pour mener un projet pilote et démontrer ses effets positifs. Ainsi, il sera plus simple de constater si la perfusion devient de moins en moins nécessaire.

 Au cours des débats, il m’arrive de proposer un argument supplémentaire qui jusqu’à présent n’a pas été contesté. Le revenu de base serait un outil permettant d’adapter l’offre à la demande d’emploi. La modulation de son montant serait une conséquence du contexte économique et social.

Le système d'ajustement

Le principe réside dans l’idée que plus le revenu de base est élevé, moins nous sommes incités à avoir une activité rémunérée. Et inversement.

Plaçons nous dans l’hypothèse d’un revenu de base déjà appliqué, quel que soit son montant. Une étude est lancée, révélant un écart entre le chômage constaté et le chômage acceptable. Il en résulte deux actions possibles :

- Dans le cas d’un chômage trop élevé, il convient d’augmenter le revenu de base, ce qui a pour effet de réduire le nombre d’actifs, c’est à dire ceux qui travaillent ou cherchent un travail. En effet, certains constatent que travailler ne leur est plus nécessaire. Leur revenu devient suffisant.

- Dans le cas d’un chômage trop bas (moins de 5%) les entreprises ont du mal à trouver des employés, indispensables à leur fonctionnement. Alors une baisse du montant du revenu de base a pour effet mécanique d’augmenter le nombre d’actifs. Certains constatent que leur revenu n’est plus suffisant, et cherchent à le compléter.

Le montant optimal

Mais où se situe le point d’équilibre ? Vers quel montant le revenu de base est sensé se stabiliser ? Est ce que le cumul de tous les revenus versés ne va pas fondre ?

Il existe bien une possibilité pour que le montant du revenu de base s’infléchisse à l’excès. Lorsque le chômage tend vers zéro, le revenu de base tend aussi vers une somme nulle. Dans une économie de plein emploi, à 2 % de chômage, le revenu de base n’aurait pas de raison d’être, en tout cas économiquement.

Cependant, dans nos sociétés occidentales, c’est plutôt l’inverse qui se passe, le chômage explose. Le revenu de base a vocation à augmenter, dans un premier temps.

Le montant du revenu de base est donc d’autant plus élevé que la capacité à intégrer des travailleurs dans l’économie est faible.

Le financement

Mais où trouver l’argent ? Augmenter les prélèvements impacterait la productivité, et le pays (ou l’île) sombrerait dans le chaos ?

Tout d’abord, un simple calcul. En France, le montant des dépenses sociales s’élève à 31 % du PIB. Un revenu de base de 600€ (pour tous) ne nécessiterait que 23 % du PIB (64 millions de français x 12 mois x 600 €, pour un PIB France de 2000 milliards €). Sans entrer dans les détails, il est évident que le financement est effectif, et ne relève pas du fantasme.

Toutefois, la problématique persiste en ce qui concerne la modulation.

Pour décrire le mécanisme, il convient de penser, non pas en salaires nets, mais en salaires bruts. Ensuite, il faut se placer dans l’hypothèse où le revenu de base est financé par les prélèvements sur les revenus (salaires et revenus du capital). Une taux d’imposition de 23% est appliqué au départ. 

Compte tenu de ces pré requis, une augmentation du revenu de base implique le relèvement du taux d’imposition. Une nouvelle loi autorise l’entreprise à réduire les versements aux salariés (et actionnaires), lorsque des besoins supplémentaires sont décrétés pour le revenu de base. Il s’en suit que le montant du revenu de base progresse d’autant que les salaires nets (et revenus du capital) régressent.

L’entreprise verse plus de taxes et cotisations, mais en contrepartie, les salariés et actionnaires, reçoivent moins. Au final, les salaires bruts, eux, restent identiques.

Il s’agit ici du principe des vases communiquants. La productivité se trouve donc inchangée.

Et avec moins de salariés

Le précédent exemple s’entend sans licenciement. S’il y a effectivement licenciement, le revenu de base perd sa source de financement, puisque l’ex travailleur, nouveau chômeur, ne fournit plus de cotisation, via son entreprise. Son salaire brut disparaît.

Dans ce cas, un prélèvement supplémentaire doit être appliqué à toutes les entreprises, équivalent au nouveau besoin de financement. Ainsi, tous les salaires bruts augmentent, et cela compense les économies réalisées par l’entreprise qui s’est séparée de son salarié.

Certaines entreprises vont gagner en compétitivité, et d’autres (celles qui n’ont pas licencié) vont perdre en compétitivité.

La productivité restera identique, mais cette fois ci, au niveau macro économique seulement.

Un espoir

Que d’avantages ! Le tissu économique se trouve renforcé, car ceux qui travaillent sont motivés, ils ont choisi. Ceux qui souhaitent créer leur entreprise disposent d’un filet de sécurité. Les entreprises deviennent plus efficaces, et peuvent se débarrasser d’employés économiquement inutiles. 

Vu sous cet angle, le revenu de base devient un outil incontournable pour résoudre la crise sociale qui ronge notre société. Il ajuste les impératifs économiques, et remet l’humain au coeur du système. Il apparaît comme le moyen d’offrir à chacun une activité en cohérence avec ses aspirations. Enfin !

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